Cette même route
Ce même horizon
De collines la longue
Échine brisée de l’aqueduc
L’écho d’une voix
Coléreuse les flammes
D’un incendie jamais
Étouffé sous les assauts
Des sacs de jute
Il avait rêvé sa vie
Avec la ténacité
D’un insecte il avait
Crapahuté par mots
Par vaux il avait
Jeté au vent tracé dans
La poussière des chemins
Des syllabes et des visages
Esquissé des bouches
Dessiné des signes
Qu’il ne comprenait pas
Il avait engrossé
Sa mémoire et son corps
D’une interminable noria
De souvenirs
Il ne lui restait
De tout cela qu’un soleil
D’hiver rebondissant
Sur des oranges pleines
Un citronnier ravagé
Par la pluie
Quelques neiges improbables
Sur le sommet des montagnes
De lave
Et quelque vague remuement
De langues dans une chair
Étrangère
Dont les parfums et les humeurs
Le remettaient au monde
Comme d'habitude, il y a du souffle. Il faut ça pour crapahuter par les mots.
RépondreSupprimerMerci, m'sieur Boudou...
SupprimerMes pérégrinations actuelles, littéraires,théâtrales ,artistiques tournent dans les univers de Beckett, Pinget, Prigent ,Devos.. ...Une des dernières pièces de théâtre à laquelle j'ai assisté était un essai expérimental, sur l'échec de l'appréhension du réel par la compagnie Moebius. Et voilà que se présente l'anneau de Moebius par Francisco Pittau. Il dit ,à son tour ,la finitude l'écriture, son aporie consubstantielle. Elle se fracasse sur l'insaisissable et indicible réalité. De la route parcourrue « par mots et par vaux », il ne reste même pas les neiges d'antan, « un citronnier ravagé » émerge et « quelque vague remuement de langues dans une chair étrangère dont les parfums et les humeurs le remettaient au monde ». Il dit l'impérieuse sensualité, la pulsion vitale avec un zeste d'indifférence et de dégoût.L'acte est essentiel pour le plaisir sauvage et solitaire de vivre , il lui faudrait un plus existentiel, la compréhension, pour être ,pleinement ,au monde.La poétique de Pittau est, toujours , un mouvement d’orfèvrerie, âpre, imprégnée de racines terriennes, picturale peinte à l'écorché des l des mots. Elle a, ici, la légèreté lourde d'un Devos, il y a du mime dans cette écriture qui sait se mettre en apesanteur malgré le poids des mots. Courage Francesco , l'écriture tisse les fils de connivences dans l'infini variété de ses formes. Ne restez,surtout , pas Moebius et bouche cousue. Continuez à chanter,comme dans dans ce poème, un hymne noir à la vie, le cri de Monch !!!....
RépondreSupprimerJe vais continuer à l'ouvrir, m'sieur Verroust, du moins tant que j'en aurai la possibilité et la force. Pour Devos, je cherche...
SupprimerPoème saisissant par sa dynamique et son mouvement que je perçois descendant, comme l'évoque son titre, dans la continuité.
RépondreSupprimerJ'y perçois un parcours tourmenté par une confrontation de l'idéal et de la crudité du monde; on y voit de belles images tout en rondeur et plénitude, la couleur du citronnier et des oranges sur un paysage de neige. Les chaînons successifs et imbriqués d'une vie "par mots et par vaux"toujours sur la brèche. Une belle unité dans la diversité.
Marie-Brigitte RUEL , psychanalyste /m.b.ruel@free.fr
Merci, Marie-Brigitte... bienvenue ici... :)
Supprimer"aporie consubstantielle"
RépondreSupprimerJe ferai jamais mieux...
Essaie tout de même, on sait jamais.
SupprimerPour Devos, je me suis planté dans mon expression. Je crois que lui mimai l'envol ,vous vous mimez l'ancrage au sol , vous savez user d'une poétique légère mais vous peignez la condition humaine clouée au sol. Les moments de poésie sont des échappées provisoires, des rêveries, presque, inaccessibles mais indispensables pour se ressourcer...Enfin, je crois!
RépondreSupprimerL'ancrage au sol, je suis bien d'accord avec vous... ça me correspond assez.
SupprimerPar votre écriture, ce blog et les liens qu'il propose j'ai découvert la poésie contemporaine et appris qu'elle pouvait être autrement que boursouflée.
RépondreSupprimerRonflant le commentaire... sincère néanmoins.
Merci à vous.
SupprimerLes flammes de/dans vos poèmes : on n'hésite jamais à se jeter dedans
RépondreSupprimerMerci, Murièle... :)
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