mardi 25 octobre 2011

Entre-deux

Un jour de nuées et de
Cendres depuis la terrasse
Ouverte sur la mer
Il s’était éveillé
Dans la puanteur
Enivrante des poissons
Qui jonchaient la plage
De sable et de cailloux

Ses mains avaient étreint
Le fer de la rambarde
Abîmé par la rouille

Derrière la maison basse
Les collines se dé-
Hanchaient avec lenteur
Montaient sans heurt
Dans l’air tourbillonnant

Des bêlements éclataient
Jusqu’à lui malgré la rumeur
Qui comblait les oreilles

“Que fais-tu là ?”

Il eut un goût de romarin
Sur les lèvres un grain
De sable sur la joue
Et une longue plainte
Qui grimpait en lui
Comme une couleuvre
Appelée par la chaleur

“Tu m’entends ? Tu m’écoutes ?”

Seuls lui parvenaient la
Vibration de l’air et
Le cliquetis des sabots
Fendus sur les rochers
Volcaniques

8 commentaires:

  1. ses mains habitées par la rouille
    auraient-elles éteint la rambarde au matin ?

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  2. Atmosphère du bout du monde,de fin du monde. Au milieu du désastre volcanique, l'homme est chez lui, le paysage est son univers, « les moutons bêlent ». A l'unisson des nuées et des cendres qui jaillissent des entrailles de la terre, une longue plainte monte en lui. « Que fait il là ? » Il n'entend que « la vibration de l'air et le cliquetis des sabots ». Cette osmose entre la nature et l'homme son attachement au sol, sont traduits d'un ton allègre . Le récit coule sans âpreté.Les émotions de l'homme ,malgré l'événement,sont empreintes d'une sensualité sourde, la puanteur des poissons est enivrante, les collines se déhanchent, Il a le goût de romarin, il sent «  le grain de sable sur la joue » sa souffrance grimpe en lui , comme une montée de désir suggérée par la superbe métaphore du serpent « comme une couleuvre appelée par la chaleur ». L'agencement des mots ,des rimes, des scansions font de la première strophe, un chant. Puis, le récit devient plus linéaire. L'homme est dans « l'avant » , la vie s’arrête, le chant aussi, « les poissons jonchent la plage », les moutons trottent sur les rochers aux bords des flots, le futur n'existe pas.L'emploi de l'imparfait, du passé simple, du présent pour les interrogations, souligne la montée sensorielle de cette évidence.Il fait corps avec son monde qui vacille,ne veut pas raisonner.Il « étreint le fer de la rambarde ».

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  3. C'est un homme jeune qui prend appui sur le tempo du poême pour vivre désormais autrement.
    Il y a là un classicisme sans orgueil qui plait , incite à renouveller la lecture plusieurs fois

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  4. Dans cet univers des sens, je me sens bien chez vous, et comme l'exprime Patrick Verroust, ne raisonnons-pas.

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  5. Très fort.
    M'évoque deux nouvelles de Quasi objets de José Saramago où les sensations physiques sont quasiment figées dans un moment de stupéfaction silencieux du monde (une histoire de centaure et une d'un jeune homme allant vers une jeune femme alors qu'en fond un animal est castré).
    Quasi allégorique.

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  6. @JEA. Possible mais j'en doute. :)
    @Verroust. Les bords de mer ont toujours un côté "bout du monde"... "aube du monde"...
    @kara. Bien vu, dites donc. Tempo, temps, rythme aussi...
    @Frederique. Ah ben tant mieux. Mieux vaut ça que le contraire.
    @Gilles. Merci... Stupéfaction silencieuse, ça me plaît beaucoup.

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  7. Je ressens la même chose que Gilles...

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  8. @Sophie K. Alors, voir réponse à Gilles. :D

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