vendredi 30 décembre 2011

Veiller le jour

Un texte que Frédérique Martin avait eu la gentillesse d'accueillir sur son blog lors d'un "vase communicant".


D’un doigt mouillé de vin
Gris elle avait sur
La table tracé
Des cercles éclatés des
Oves hésitantes et
Des hachures figurant
Le gribouillis de ses nerfs

Elle mâchonnait une
Mélopée qui battait bat-
Tait comme un cœur
Tandis que son regard
Se figeait
Sur le frémissement de l’ombre
D’une feuille sur le mur
Se figeait sur le reflet
Du soleil dans le verre
Se brûlait aux taches
De la nappe claire

Un seul mot s’ex-
Tirpait de sa chair “dormir”
Mais le sommeil la dé-
Laissait sur le seuil
De sa chambre statue
De plâtre traversée de
Sanglots
Debout sans fin vacillant
Sur son socle

“Dormir dormir dormir”
Elle appelait la nuit
Réclamait la nuit
L’exhortait à poser
Son poids sur ses paupières
Sur son corps
Sur ses membres tremblants
Sur le trou qui s’ouvre
De plus en plus en
Elle

8 commentaires:

  1. La redécouverte de ce poème confirme, à une lecture plus mature, l'impression d'une écriture chirurgicale . Les mots décrivent , d'une façon quasi clinique une douleur qui se fixe dans des gestes, des regards, une rengaine obsédante, une attente désespérée presque morbide du sommeil. Cette confrontation désempare. Elle réussit à faire ressentir l'état d'impuissance et d'incommunicabilité, face à la souffrance d'autrui., le vague écœurement, l'envie de fuir,de détourner les yeux. Si tel était l'intention de FP, il a atteint son but.Ce texte est fort d'expressivité,de concision...poème ou témoignage ? Peu importe.

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  2. Très plaisant à lire et à relire !

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  3. Rien ne dit que je ne vous inviterais pas de nouveau à valser avec moi. On finit par y prendre gout.

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  4. Bonne continuation pour votre œuvre d'écrivain-anthropologue embarqué dans l'aventure de la condition humaine. Vous travaillez à la masse, en casseur de pierre, jusqu'à obtenir des sculptures horlogères précises,concises,crues des écorchés de la vie. Je pense qu'il vous faut du courage,de la rigueur, des règles de conduite pour conduire cet ouvrage dans les mystères de l'écriture.

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  5. "Du soleil dans le verre
    Se brûlait aux taches
    De la nappe claire"...
    Magnifique (entre autres).

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  6. @Anonyme. :) Grazie.
    @patrick Verroust. Je ne suis pas journaliste et je ne raconte jamais ma vie. J'aime inventer.
    @Olivier. Merci et re-merci.
    @patrick Verroust. Merci pour vos encouragements.
    @Sophie K. Trop gentille... mââârci boucou... :D

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  7. Wow une fois de plus très beau, vertigineux encore et encore… j'aime toutes ces comparaisons, ces images, ces métaphores, ces répétitions : et tout particulièrement, ici…. ces hachures figurant le gribouillis de nerfs….. cette mélopée mâchonnée qui bat, qui bat comme un coeur et puis…. la nuit, appelée, réclamée, exhortée à poser son poids sur des paupières, sur un corps, sur des membres tremblants. Bravo..

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