vendredi 23 novembre 2012

Après-midi d'hiver

Au chien qui
Trottait dans l’herbe
Rase drue
Roussie par le froid
Elle avait tiré
Des pierres travaillées
Et adoucies
Sous le fil du torrent

Au ciel elle avait
Hurlé en se tenant
L’entrejambe d’une
Main qui tentait
De contenir le
Paquet de douleurs
Le noyau de cris
Encore contraints
Le grouillement des chairs
Et l’efflorescence du
Souffle

Le jour était bleu
Et doré les arbres
Noirs et déchirés
Le soleil clair comme
Un blanc d’œuf
A peine saisi
Par la flamme
Et dans la fugace
Suspension du temps
Un vent venu du
Nord semait un friselis
Parmi les rares feuilles
Et les buissons
Enchevêtrés

Une écume à goût
De lait suri
Lui envahit la
Bouche amère gorgée
Expulsée avec
La tranquillité d’une bête
Harassée

7 commentaires:

  1. Ça donne mal au ventre :)
    ou c'est une bouffe tragique, ou c'est une fausse-couche et du mort-né découpera-t-on le cordon de la non-existence...

    Impressionnant poème, Francesco

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    1. Merci, Michèle, votre lecture me fait toujours très plaisir. :)

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  2. Aucun rapport avec le poème, si ce n'est que c'est un après-midi de presqu'hiver, hier, que je suis tombée en arrêt, dans ma librairie, devant une merveille :

    un très grand livre, par la taille et par l'objet, PROMENADE AU JARDIN de Pittau & Gervais.

    Nous avons, lecteurs, beaucoup de chance...

    http://www.gallimard-jeunesse.fr/Catalogue/GALLIMARD-JEUNESSE/Hors-Serie-Giboulees/Promenade-au-jardin

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    1. Oh, c'est très gentil de parler d'un autre aspect de mes activités. Merci d'apprécier.

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    2. C'est vrai que c'est très différent de ce que vous faites ici :)
      Je me rappelle m'être dit la première fois que j'ai découvert votre travail dans le domaine de l'album, que ce n'était pas possible que ce soit vous, qu'il s'agissait de quelqu'un qui portait le même nom :)
      Et aujourd'hui, tous ces talents en vous, cette hyper connexion que vous avez à la création, eh bien je m'y fais très bien, ça cohabite parfaitement dans la réception que j'en ai :)
      Du coup c'est à vous que je m'adresse sans avoir besoin de spécifier que je parle d'un autre domaine :))

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  3. Francesco Pittau déclenche une sacrée bourrasque avec cette peinture d'une « vie silencieuse ». La lutte de la femme pour sa survie se passe dans un temps comme dilaté. Première strophe, première action, elle chasse le chien qui trottait à coup de pierres travaillées et « adoucies par le fil du torrent.Ce « et » participe de la dilatation du moment Le décor est planté, la nature, la froidure, le torrent, la peur du chien.Deuxième strophe. Le long hurlement de douleur, suite probable d' un accouchement sauvage ou d' un viol.Les vers sont courts comme les élancements, les piques de la douleur, ils suent l'angoisse, la tentative de reprendre la maîtrise du corps.Dans les deux derniers « le grouillement  des chairs » « l'efflorescence  du souffle » font sentir la situation de bête blessée à en cracher les poumons. Ces deux expressions installent une distance clinique avec cette femme en lutte avec son mal.La troisième strophe est un temps de respiration dans « la suspension du temps » , un temps d'évasion hors de soi, hors la souffrance, une anesthésie mentale. La dernière strophe, est un dernier spasme dont l'animalité nous achève. Les croquis de Francesco, comme certains de Brueghel l'ancien, d'Otto Dix disent l'humain dans ses souffrances , ses combats pour vivre, sa solitude, ils vont au delà de la beauté poétique qui n'est qu'un instrument pour exprimer les vécus observés avec leurs charges d'émotions. Celui ci est fort de fort !

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    1. Je ne sais pas si vous avez raison sur tout mais le mot "croquis" me convient parfaitement. Brueghel l'Ancien aussi d'ailleurs.

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