samedi 18 janvier 2014

Des vies silencieuses

Le goût des framboises
Revient intact et frais
Et les bois alentour
Se dressent dans la chambre
Fermée sur l’aube hésitante
Et les coups absurdes
Du monde qui s’éveille

Des frémissements des tremblements
Des respirations énormes
Soulèvent la peau
Des rêves et des songes
Encore engourdis
Dans leur mélasse

Les rideaux sont de marbre
La table est un gisant
Les chaises sont mortes
Pendant la nuit
Comme des animaux sacrifiés
Le canapé placide
Attend qu’une vie nouvelle
Lui soit insufflée

C’est une maison béante
Un trou dans les entrailles
Une niche dans l’estomac
Pleine d’oiseaux nocturnes
De souris d’insectes
Innomés
De brins d’herbe
Et de poires croquées
Dans l’éblouissement
D’un mercredi de vergers

6 commentaires:

  1. patrick verroust22 janvier 2014 à 15:38

    « Des vies silencieuses » , un court poème qui laisse en bouche des saveurs contrastées , du salé-sucré. L'atmosphère est lourde mais un ton guilleret semble, néanmoins, émerger . Les habitants du lieu sont absents du texte. L'écriture est subjective, nous sommes mis à la place des dormeurs.Le choix des mots , leur disposition fait entendre les ahanements asthmatiques des dormeurs aux rêves agités. La nature et le mobilier sont porteurs , dans un anthropomorphisme à la Ingmar Bergman des angoisses des êtres qui mijotent dans leur jus, sans autre bruit et manifestation que leurs expectorations psychiques et physiques.Le poète a mitonné son expression avec un soin de chef cuisinier.Il a réduit les mots à l’essentiel, saisis juste à point. Ça a fraint, avec toute la délicatesse qu'il est possible de donner au saisissement de la viande pour bien lié un waterzoï , comme le disait ma grand mère, dans son patois, mélange de batave , de picard, de vieux François....François Villon usait de la même expression, lui qui appréciait autant les coqs à l'âne que les coqs au vin . Il était tout sauf un empoté, il jonglait avec la vie et les mots, avait la langue bien pendue même en ballade....

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  2. A reblogué ceci sur Biffures Chroniqueset a ajouté:
    Un immense poète :

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  3. Toujours aussi attentif, m'sieur Verroust. Merci.

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  4. Et à la fin tout recommence...C'est beau !

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    1. Ah ben... merci... ça me touche beaucoup quand ça touche.

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