lundi 21 avril 2014

L'Ivresse

Il buvait le vert
Des frondaisons
Le bleu de l’ombre
Le rose des clématites
Il buvait le vent
Qui passe sur l’herbe rase
Et frêle
Il buvait la ligne
Lâche du linge sur son fil
Tendu comme un cri
Il buvait le mystère
De l’oiseau-mouche
Suspendu
Entre deux mondes fuyants
Il buvait la tache
De soleil au bas d’un mur
Effondré
Il buvait le lait tiède
De l’après-midi
À l’heure ou le juste
Bascule dans l’injuste

Il oubliait ce qui flanche
Ce qui meurt
Ce qui finit en cendres
Et en poussières
Il n’avait d’yeux
Que pour les orages
Les fulgurances et l’odeur
Soufrée
Sur les collines
Assombries
Quand le monde soudain
Semble si neuf
Si pur et résolu
Que l’émotion
Cisaille la gorge

3 commentaires:

  1. patrick verroust21 avril 2014 à 20:26

    Poème, tout de simplicité limpide. La contemplation active des amoureux de la nature qui s'y saoulent pour se ressourcer....L’ivresse fugace du montagnard urbain, le vivifiant élixir des pastoureaux, la nourriture du poète, l'étonnement merveilleux du lecteur...Si hier « flancha » et « mourut, » le monde , sous les regards de chez ces gens là, est neuf.....Une élévation simple de l'esprit , une noblesse qui naît par delà les vicissitudes......

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  2. Si vous saviez comme la simplicité me plaît en art. :)

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  3. Oui, la simplicité, ça tient à un fil, très très sensible, et cela doit avoir quelque chose à voir avec de la justesse : il y a des passages beaux et mystérieux comme des lignes pures sur l'horizon : ce fil à linge tendu comme un cri, ce lait tiède bu à l'heure où (un accent?) le juste bascule dans l'injuste...et cette émotion qui cisaille la gorge. Merci, Francesco..

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