vendredi 13 juin 2014

La naissance des fables

D’un coup de reins le soleil
Délaisse la pièce aux porcelaines
Et une poignée d’oiseaux
Traverse l’espace de la fenêtre
Ouverte sur rien d’autre
Qu’une campagne sourde
Et atonale

Le tapis soupire
Dans l’après-midi qui craque
Entre les doigts
Comme un biscuit
Et l’on rêve à des gares
Béantes à des rails
Qui filent d’un trait
Vers les montagnes harassées
À des sentiers de chèvres
Qui sentent la crotte
Et le fenouil

Le vent seul peuple les arbres
Le seul bruissement  des arbres
Habite les airs
Et la respiration soudain
Se voudrait plus ample
Avec des vigueurs
Stupéfiantes
D’animal pourchassé

Dans un chaos de roche
L’on avance la bouche
Pleine de poussière
Et d’histoires impossibles
D’histoires murmurées
De paroles arrachées
À l’inconnu

Les loups passent
Les vitres tremblent  sous leur haleine
L’ombre s’ébranle
Et prend possession des plafonds
Où un monde de gueules
Rouges et de roulades d’yeux
S’éveille

6 commentaires:

  1. Affable, le poète sème à foison, des images chaudes teintées d'une tension sourde. Des échappatoires s'esquissent.  La respiration voudrait trouver la vigueur « d'animal pourchassé » mais des « histoires impossibles d'histoires murmurées de parles arrachées à l'inconnu » guettent , emplissent la bouche. Les angoisses séculaires surgissent, les loups passent , un monde de gueules rouges et roulade d'yeux s'éveille....Un cauchemar , subrepticement, a envahi l'espace avec la venue de l'ombre. Francesco n'a pas son pareil pour débusquer la chaleur qui rend « la campagne sourde et atonale », fait « soupirer le tapis », laisser entrevoir un espoir , une utopie vite tuée dans une rêverie vaine. La dure réalité de la condition humaine peuplée de peurs et de fantômes légués depuis la nuit des temps est assénée dans une strophe haletante comme un train qui passe...Il est loin, soudain, « le coup de reins » du soleil …..Avec ce diable de poète qui joue à faire peur ,on s'en laisse conter !

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    1. Diable de poète ! Comme vous y allez, m'sieur Verroust... :)

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  2. Ah, ça marche
    .. J'aime bien ce que dit Patrick au-dessus : "des images chaudes teintées d'une tension sourde" et sur le fait de "débusquer la chaleur" à propos de ta poésie.
    J'aime beaucoup les variations du rythme, ça rend ta poésie très dynamique, et c'est un plaisir de te lire....

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    1. Merci Sophie... c'est un plaisir de savoir que tu me lis. :)

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